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CHAPITRE
2
Deux
mains venues de nulle part se cramponnent à la jointure des portières.
Dépourvues de corps et de poignets, elles ressemblent à deux grosses
araignées maléfiques. Malgré des doigts étrangement courts et renflés
qui me fascinent car ils sont dépourvus d'ongles, elles serrent
fermement les gros joints en caoutchouc servant à amortir la fermeture
des portes. Virginie tourne le dos à la scène et ne voit rien, mais
elle comprend bien à nos mines qu'il se passe quelque chose. Le
train roule à pleine vitesse maintenant et je commence à me lever.
Au moment où Boubak et moi-même nous nous apprêtons à intervenir,
les portières s'écartent et un homme apparaît enfin ! Alors je me
rassois.
- Qu'est-ce qui se passe ? demande Virginie à voix basse.
- Rien... je lui réponds, encore légèrement tendu. Mais elle sent
bien que ce n'est pas vrai.
- Qu'est-ce qui se passe ? demande-t-elle à nouveau, cette fois-ci
en s'adressant à Boubak.
- C'est un vieux pépé qui vient de rentrer dans le wagon, c'est
tout..., lui répond Boubakar. Ne te retourne pas. Ça ne se fait
pas... C'est un vieux grand-père, pas un animal de foire...
Boubak a des principes et il aime qu'on les applique.
- Boubak. Tous les grands-pères sont vieux, lui répond Virginie.
À ma connaissance, le plus jeune a déjà dépassé les trente-cinq
ans, ce qui signifie qu'il n'est plus de la toute première jeunesse.
Comprends-tu ? En supposant qu'il n'ait qu'une espérance de vie
de 70 ans, il a déjà un pied dans la tombe, c'est mathématique.
Alors s'il te plaît, ne dis plus jamais un vieux grand-père et en
échange je ne tournerai pas la tête. Décris-le moi simplement.
- C'est un vieux papi, c'est tout, grogne Boubak. Il n'y a rien
à dire.
- Un vieux papi qui vous a fichu la trouille, c'est totalement banal,
rétorque Virginie. Bravo pour le commentaire journalistique.
Suite
(vers la page 5 sur 5)
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